Monday, June 30, 2014

Le sélectionneur, l'entraineur et l'agent

Plantation de thé à Dong Ding
En attendant le match de coupe du monde France-Nigeria, amusons-nous un peu des similitudes entre le foot, le thé et le western 'Le bon, la brute et le truand'!

Hung Shui Oolong du printemps 2014
Dans le rôle de la brute, on a l'entraineur de foot (= le fermier). Il a en charge un club avec les jeunes des environs. Il fait avec ce qu'il a sur place. C'est un travail très dur et physique (de brute!), car il faut s'occuper de la formation de tous les jeunes pour leur faire réaliser leur potentiel. Les éléments sont souvent contre lui (pression du public, des parents, la météo, le manque de moyens). Rares sont les Messi ou Benzema. Pour un joueur excellent, il en forme aussi une vingtaine de passables.
Le fermier de thé est lui aussi limité par les plantations qui lui appartiennent ou qu'on veut bien lui prêter. Certaines sont mieux placées que d'autres, mais le manque de moyens (= le prix du marché du thé) l'empêche souvent de s'en occuper de la meilleure manière. Et puis, il y a la météo imprévisible qui lui joue souvent des tours... Aussi, la qualité de ses thés varie à chaque production et au final, s'il produit souvent des thés corrects, les feuilles exceptionnelles sont rares. Son métier est très physique et l'on comprend qu'il lui faut souvent exagérer ce qu'il pense de ses thés pour les vendre. On ne lui en tient pas vraiment rigueur, car c'est lui le producteur et il en a littéralement sué pour produire ces feuilles.
Dans le rôle du truand, j'imagine l'agent sans principes. Qu'importe le joueur et son parcours de formation, il est prêt à tout pour acheter et vendre. Là où l'entraineur exagère par nécessité, il ment systématiquement sur la forme, la technique de ses joueurs. Il pourra même les initier au doping pour améliorer leurs performances...

Dans l'industrie du thé, les marchands de contrefaçons sont omniprésents. Les thés sont parfumés d'odeurs exotiques pour masquer leurs faiblesses... Le thé de qualité est rare car il a un certain coût. (Pratiquement toutes les boutiques occidentales qui m'ont contactées ces dernières années m'ont donné un critère fondamental: le thé ne doit pas coûter plus de 50 à 95 USD par kg. -Et il doit être organique, frais et de montagne de préférence!- C'est mission impossible, sauf à ignorer la réalité et à croire ses propres mensonges!)
Mais venons-en au 'bon' de notre histoire, le sélectionneur. Il ne s'agit plus pour lui d'entrainer des joueurs, mais de trouver les meilleurs et de produire, en un temps très court, celui d'un tournoi, une osmose, une harmonie dans ce groupe. Mu par un idéal, le sélectionneur veut faire éclater la beauté du jeu le plus rapide, le plus technique et spéctaculaire... Pour écrire une page de légende, il a besoin de joueurs au top de leur forme et de leur art. Il leur met à disposition tous les moyens dont ils ont besoin pour donner le meilleur d'eux-même. Pour la coupe du monde, l'argent n'est pas un problème: les joueurs jouent pour l'honneur de leur pays (et pour leur notoriété qui sera moyennable en club).
Le sélectionneur de thé a pour tâche de trouver les meilleures feuilles produites par les fermiers. Il a donc intérêt à établir de bons contacts avec ceux-ci, et de bien s'y connaitre en thé pour repérer la qualité supérieure. Le fermier laissera d'autant plus facilement partir ses meilleurs thés s'il sait que l'acheteur les apprécie pour leur qualité. Il a fait un travail difficile et il mérite qu'on lui montre du respect. Une façon très simple consiste à ne pas négocier le prix de ces thés, et de payer le prix demandé. (Ainsi, je ne marchande jamais avec mes fermiers. Ma seule alternative est de ne pas acheter le thé si je trouve que le prix demandé est trop haut par rapport à sa qualité.) - Cette démarche permet aussi de réduire les risques de recevoir autre chose que ce qu'on a goûté! Et le fermier aura plus tendance à me contacter en premier pour ses meilleurs productions futures!-
Avec ses compétitions, le thé aime aussi se mesurer les uns aux autres. Il y a 6 jours, un restaurateur américain m'a écrit: "your fine teas are head and shoulder above what we currently have available from Taiwan and Yunnan". Sachant qu'il m'a comparé à une autre source sérieuse, cette petite phrase fut aussi jouissive qu'une qualification en quart de finale de coupe du monde!

Le sélectionneur de foot est passionné par le jeu du ballon comme nous le sommes par le jeu des feuilles et de l'eau bouillante! Chaque dégustateur sérieux est son propre sélectionneur chaque fois qu'il effectue un achat de thé. C'est le premier pas, la condition sine qua non pour préparer une infusion réussie avec tout le reste de l'équipe: la bouilloire, la théière, la jarre, le bol à eaux usées, et tous les autres accessoires. Avec chaque thé, on vit un match technique et plein d'émotions.
Et au final, on lève la coupe et on l'embrasse, rempli de bonheur et de bon thé!

2 comments:

miig said...

hahaha - c'est une drôle idée de comparer le thé avec le foot qui m'amuse beacoup - merci pour cet article sympa qui compare le leger avec le profonde!

Marilyn Miller said...

Love the way the small tree branch reflects in the tea.